Ces voix dans le couloir. Pourquoi parlent-ils aussi fort ? Oh mon Dieu, ma tête. Je sens quelle va exploser. J’ai tellement mal. C’est insupportable. Qu’on arrête ce supplice par pitié. Achevez-moi. Et pour l’amour de Dieu, « Fermez-la. » Le noir complet. Je n’ai aucun souvenir d’hier soir. C’est à la fois horriblement frustrant, et délicieusement jouissif. J’aime cet état amnésique. Je crois que c’est ce que je préfère dans l’alcool, en plus du goût bien sûr. En revanche le mal de crâne le lendemain, je m’en serais bien passée pour le coup. Surtout que j’avais quelque chose de prévu aujourd’hui. Une sortie. Si seulement j’arrivais à me souvenir...

Cette voix. C’est une fille, là dans le couloir. Winny ? Non. Candy ? Oui voilà Candy. Ca y est, c’est avec elle que je dois sortir. Sans doute pour une séance de shopping. Je n’y ai pas trop la tête, mais j’ai du le lui promettre…Serait-elle en train de parler toute seule ? Non, il y a un homme avec elle. Jack. Oui, Jaack. Il faut que je me lève, je dois lui... wow, en fait non, assise c’est bien aussi. Foutu tournis. J’ai comme un arrière gout dans la bouche, et un remake du grand huit dans mon estomac. Mais ça va, à peu près, plus ou moins. Ouais, c’est pas la grande forme. Mais personne n’en saura rien.

Je sors dans le couloir simplement vêtue d’un shorty et d’un débardeur, c’est une habitude la famille. Et merde, la salle de bain d’à côté est occupée. Une chance que la maison soit grande et qu’il y en ait une deuxième. Dommage qu’elle soit à l’autre bout du couloir. Pourvu que… yes. Je m’enferme à l’intérieur. L’opération renaissance pour commencer. Première étape, une bonne douche. Quel bonheur. Il n’y a rien de mieux le lendemain d’une soirée bien arrosée. Les cheveux dégoulinants j’y passe quelques coups de brosse, avant de les attacher dans un chignon grossier. J’ouvre le troisième tiroir.

Seconde étape, maquillage. Un quart d’heure plus tard environ je ressors de la salle de bain et retourne dans ma chambre. Ce haut et ce mini-short feront très bien l’affaire. Avant qu’ils ne prennent un mauvais pli, je détache mes cheveux qui retombent sur mes épaules, humides et froids, un frisson me parcourt. Un étage en dessous, j’entends des bribes de conversations. Visiblement tout le monde s’est réuni dans la cuisine pour le petit-déjeuner. Tout le monde sauf moi. Mais vous savez ce qu’on dit, les stars savent se faire attendre.

J’avais vu juste, le clan Chatterton dans sa quasi-globalité est en pleine discussion. Candy attire immédiatement mon regard. Cette robe lui va vraiment bien, j’ai bien fait de la lui donner. TAC n’a pas vraiment l’air de cet avis. Quel rabat-joie. Jack est appuyé contre le plan de travail dans un coin de la cuisine. Je me sers une tasse de café, attrape un croissant au passage et le rejoint. Candy relève la tête et hume l’air. Oops, captée. « Ici, c'est moi qui te l'ai piqué. » Inutile de me justifier, entre sœurs, on se partage tout, n’est-ce pas ? Elle me sourit et retourne à son petit-déjeuner. Je bois une gorgée de café, brûlant au passage et en profite pour avaler un comprimé d’aspirine, histoire de faire passer cet affreux mal de crâne qui n’a pas l’air d’apprécier les conversations matinales de mes frères et sœurs.

« T’aurais dû venir hier, c’était tout simplement génial. Enfin je crois » lui lançais-je en lui donnant un coup de coude. Pour une raison que je ne comprendrais certainement jamais il arrivait parfois à Jack de refuser de sortir. Quelle drôle d’idée n’est-ce pas ? De mon côté, je ne loupe pas une seule soirée. Je m’en voudrai tellement d’entendre des ragots dont je n’aurais pas été la source. J’étais donc sortie seule la veille. Tim était sans doute venu me chercher tôt ce matin. A vrai dire je n’en ai aucun souvenir. Le vide total je vous dis. Mais c’est habituellement lui qui me sert de taxi. Une vieille habitude prise à Londres alors que Jack vivait déjà ici, et que j’ai gardé, au plus grand damne de mon frère cadet. J’essayais de capter son regard. Bingo. « Merci. » Lui glissais-je à voix basse, avec un sourire. Aucune réaction. Que ferais-je sans lui ? Il faut bien lui reconnaitre cette qualité. TAC répond toujours présent.